Oui, la douce nuit s’est faite, et voici
Qu’en l’azur foncé du ciel obscurci,
S’allumant partout, par là, par ici,
Et l’une après l’une,
Tandis que l’étang est tout coassant,
Les étoiles vont en nombre croissant
Tout autour, autour de grêle croissant
De la pâle lune !
Éclats de saphir et de diamant,
Étoiles, je fus longtemps votre amant,
Et je vous parlais, le soir, ardemment,
Perdu dans la nue !...
Mais ma poésie a changé de cours
Depuis que, tenant de naïfs discours,
Ses petits cheveux au front coupés courts,
Sylvette est venue !
Chers astres du ciel, astres familiers,
Vous êtes bien beaux, là-haut, par milliers,
Mais allez ! serez bien humiliés
Quand, parmi ses voiles,
Elle apparaîtra dans le bleu jardin,
Et, voyant ses yeux, vous serez soudain
Pour vos propres feux prises de dédain,
Mes pauvres étoiles !
In Les Romanesques (1894)